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ALBATROSS Aldosterone Lethal effects Blockade in Acute myocardial infarction Treated with or without Reperfusion to improve Outcome and Survival at Six months follow-up

Pierre Sabouret – ACTION-Group, Institut du Cœur Paris

Gilles Montalescot (Paris, France), John Mc Murray (Glasgow, Royaume-Uni)

Le blocage du système rénine-angiotensine aldostérone (SRAA) a démontré des bénéfices dans l’insuffisance cardiaque, mais aussi dans le cadre des cardiopathies ischémiques avec dysfonction ventriculaire gauche. L’étude EPHESUS (B.pitt, New Engl J Med 2003) avait plus récemment objectivé les bénéfices cardiovasculaires de l’Eplérénone dans le cadre des syndromes coronariens aigus avec une FEVG < 40%, avec réduction notamment de la mortalité totale, le bénéfice étant plus marquée lorsque l’introduction du traitement avait lieu entre J3 et J7 post-SCA (versus entre J7 et J14).

Il était donc pertinent d’évaluer les bénéfices éventuels d’un blocage précoce du SRAA chez les patients coronariens, puisque l’aldostérone entraine des effets délétères précoces sur la coagulation, la volémie, la fonction endothéliale, le remodelage vasculaire,les troubles rythmiques, en plus du remodelage VG bien documenté. Deux études (F.Beygui, circulation 2006, B Palmer, Eur Heart J 2008) avaient montré une corrélation entre le niveau d’aldostéronémie et la mortalité cardiovasculaire en post-infarctus. Une étude académique a donc été mise en place, dont les résultats étaient présentés par Gilles Montalescot, évaluant l’introduction très précoce de la spironolactone (<J3).

1600 patients coronariens ont été randomisés à la phase aigue d’un SCA entre une perfusion intraveineuse de Soludactone 200 mg suivie par une dose quotidienne de 25 mg d’Aldactone, versus un placébo, en add-on des traitements recommandés.

Le critère primaire est un critère combiné associant décès, arrêt cardiaque ressucité, tahycardie ventriculaire, fibrillation ventriculaire, indication à un défibrillateur implantable, insuffisance cardiaque à 6 mois de suivi chez des patients aussi bien avec STEMI que NSTEMI.

Le calcul de la taille de l’effectif était basée sur un taux de 20% du critère primaire dans le groupe contrôle, avec un Hazard ratio de 0.71 en faveur du groupe spironolactone. Un effectif de 1600 patients et un total de 269 événements étaient suffisants pour avoir un risque alpha de 80%, pour démontrer la supériorité du groupe spironolactone.

1615 patients ont été randomisés (figure 1) avec 1603 patients analysés en intention de traiter à 6 mois de suivi. L’âge moyen était de 58 ans, avec environ 50% de fumeurs et 16% de patients diabétiques, avec une majorité de STEMI (612/801 dans le groupe spironolactone), avec une FEVG moyenne à 50%.

Sur la population totale, aucun bénéfice n’a été observé sur le critère primaire combiné, ni sur chaque critère analysé séparément (figure).

Un signal très positif est à signaler dans les analyses pré-spéficiées des différents sous-groupes, à savoir une réduction significative (Hazard Ration 0,20 ; p=0,0044) chez les patients avec STEMI, avec les limites méthodologiques inhérentes à cette analyse.

On note évidemment plus d’hyperkaliémies dans le groupe spironolactone, mais qui ne concerne que 3% des patients en pratique.

Conclusion

Le blocage précoce du SRAA par la spironolactone 25 mg ne procure pas de bénéfices cardiovasculaires à la phase aigue sur l’ensemble des SCA.

A noter cependant une fenêtre potentielle de prescription chez les patients présentant un STEMI, en sachant que ces résultats positifs ne seront probablement pas confirmés par une étude spécifique chez ces patients coronariens, puisque la spironolactone est générique, et que son bas coût ne favorise pas son développement clinique dans le contexte actuel, et n’autorise pas à la prescription de la spironolactone en l’absence de dysfonction VG chez les patients coronariens.

30 août 2015